Plus de deux ans après l’adoption de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, faut-il le rappeler dans un rare consensus, la concrétisation du fonds national de financement de la protection de l’enfance, créé par la loi, est aujourd’hui remise en cause.
Le 23 février dernier, le secrétaire d’Etat Nadine MORANO indiquait pourtant que le décret concernant la compensation des charges relative à la mise en œuvre de la loi pour les départements avait été signé. Pour autant, sa date de publication restait inconnue.
Or, nous avons appris mardi 23 juin, lors d’une réponse de la secrétaire d’Etat à une question orale au Sénat, que « la création d’un fonds supplémentaire viendrait complexifier, brouiller les financements déjà existants » ! Les associations et les départements considèrent, au contraire, que ce fonds permettrait enfin une mise en œuvre totale des dispositions de la loi, ce qui n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui.
La plupart des départements, anticipant le versement du fonds et par souci de ne pas retarder l’application de la loi, se sont néanmoins appropriés les dispositions avant même la parution des textes réglementaires – dont six sont toujours en attente de publication – se trouvent aujourd’hui lésés puisqu’il leur est désormais objecté que même sans compensation de l’Etat, la loi a tout de même été mise en œuvre sur les territoires.
Nous ne pouvons nous résoudre à cet argument avancé par la secrétaire d’Etat. En effet, la cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes – qui sert de baromètre à l’Etat pour évaluer la mise en œuvre de la loi – n’est pas l’unique dispositif à installer par les conseils généraux. D’autre part, le budget alloué au fonds de protection de l’enfance financera les dispositifs nouveaux introduits par la loi.
La protection de l’enfance n’est définitivement pas une priorité pour le gouvernement. Curieusement, pour la loi de prévention de la délinquance de mars 2007, tous les décrets ont été rapidement publiés et le fonds interministériel de prévention de la délinquance créé trois mois seulement après l’adoption du texte. Ce dernier ayant d’ailleurs été abondé de 50 millions d’euros en 2007 et de 35 millions d’euros en 2008 et 2009.
On peut désormais craindre un arrêt, voire un recul, de la mise en œuvre de la loi relative à la protection de l’enfance, menaçant ainsi les dispositifs pourtant destinés à améliorer la prise en charge des enfants en danger ou en risque de l’être. Faudra-t-il attendre une nouvelle affaire de maltraitance médiatisée qui bouleversera l’opinion publique pour que le gouvernement révise sa copie et accorde de l’intérêt à la protection de l’enfance ?
L’UNASEA/CNAPE et UNICEF France demandent au Premier ministre un arbitrage, dans les meilleurs délais, afin que le fonds de protection de l’enfance soit enfin abondé.